La place de la France sur l'éc hiquier mondial
Grâce à la diversité de ses entreprises, la France occupe une place de choix sur le marché mondial des semences. Saura-t-elle la garder ?
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Si aujourd'hui, la France est le premier producteur européen de semences et le premier exportateur mondial, c'est grâce à ses conditions agroclimatiques privilégiées, à l'importance de son agriculture, mais aussi au dynamisme de ses entreprises semencières. Et contrairement à d'autres secteurs d'activités, le secteur des semences en France est resté peu concentré. Il comptait 71 sélectionneurs en 2011, selon une enquête « structure » réalisée en 2013 par le Gnis, 246 entreprises de production de semences et 8 700 distributeurs de semences, grande distribution comprise. Le nombre de sélectionneurs a évolué légèrement depuis : le capital de Momont a été complètement racheté par le groupe allemand KWS ; Florimond Desprez a acquis Germicopa ; Carneau a été intégré à Semences de France ; Frédéric Poujaud vient de reprendre CD Seeds qu'il a rebaptisé Energy Seeds...
Une faible concentration en France et en Europe
Mais de nouvelles structures ont aussi vu le jour, avec l'implantation de Dow Seeds par exemple, avec deux stations de recherche dans le Centre et le Sud-Ouest, l'arrivée de l'espagnol Semillas Fito en maïs, ou tout récemment celle du groupe américain Remington, avec la création de la structure de production de semences Mistral Seeds dans le Sud-Est. Comme le souligne le Gnis, l'indice de Herfindahl-Hirschmann (1) qui permet de calculer la concentration d'un marché, était de 1 019 pour le secteur de la création variétale. Or, un indice inférieur à 1 500 signifie que le marché est peu concentré, entre 1 500 et 2 500, moyennement, et supérieure à 2 500, très concentré. « C'est aussi le cas dans l'ensemble de l'Union européenne, constate Garlich von Essen, secrétaire général de l'Esa, European Seed Association. Nous estimons le nombre d'entreprises semencières en Europe à environ 7 200, dont 250 à 300 engagées dans la sélection, aux alentours de 2 500 dans la production de semences. » Dans certains pays, la concentration est beaucoup plus forte. « Aux Etats-Unis, par exemple, le marché des semences de maïs est détenu à 37 % par Monsanto et à 35 % par Pioneer, souligne François-Xavier Masson, chargé d'affaires à Unigrains. AgReliant, filiale de Limagrain et KWS, vient ensuite derrière avec 7 % du marché, devant Dow, 6 %, Syngenta, 5 % et tous les autres, 11 %. » Le secteur des semences en France se caractérise aussi par des structures d'entreprises très variées et des modèles économiques qui peuvent être différents d'une entreprise à l'autre.
Un grand nombre de petites entreprises
A côté du groupe coopératif, Limagrain, numéro 1 français, on trouve un grand nombre d'ETI, entreprises de taille intermédiaire de type familial comme Florimond Desprez, à capitaux privés comme RAGT ou Caussade, ou de type coopératif comme Euralis semences ou Maïsadour... et de nombreuses PME, comme Deleplanque, Lemaire Deffontaines, Secobra... Et bien sûr, les filiales en France d'entreprises étrangères. Certains semenciers ont développé des modèles économiques très particuliers comme Semences de France, qui a cédé son activité sélection à RAGT, pour se concentrer sur la production et la mise en marché des variétés. Ou encore Maïsadour semences, filiale d'une coopérative, mais dont 40 % du capital est détenu depuis 1999 par Syngenta. Cette structure originale va évoluer car Maïsadour et Terrena Jouffray-Drillaud ont engagé des discussions qui devraient aboutir, en fin d'année, pour unir leurs activités semences et former une structure qui passerait d'un chiffre d'affaires de 140 M€ chacune, à 280 M€.
Des opportunités pour les autres semenciers
Les acteurs français ne semblent pas s'inquiéter, outre mesure, du vent de concentrations qui souffle au sein des groupes phytos-semences. « Ces concentrations sont en train de s'opérer vraiment dans le haut du tableau, reconnaît François Desprez, président du groupe Florimond Desprez. Ces opérations vont prendre du temps aux grands groupes et mobiliser leurs équipes. Pendant ce temps, elles laissent des opportunités aux autres semenciers qui vont continuer à travailler. Les groupes nouvellement constitués risquent de perdre du personnel qui pourra venir renforcer, par ses compétences, les équipes d'entreprises plus modestes comme les nôtres. » « On représente souvent la taille des entreprises dans un graphe sous la forme de bulles, commente de son côté, Philippe Moreau, responsable développement support moléculaire à la recherche, chez Euralis semences. Plus les bulles sont grosses et plus les interstices entre ces bulles sont grands... donc plus il y a la place pour des entreprises de taille plus modeste. »
Si en France et en Europe, les entreprises par leur diversité ont réussi jusqu'à présent à résister à la concentration rencontrée sur d'autres continents, les semenciers français sont-ils suffisamment armés pour affronter la concurrence internationale dans les années à venir ? « C'est surtout une question d'environnement réglementaire et d'accès à la recherche », estime Régis Fournier, président de l'UFS, l'union française des semenciers. François Burgaud, du Gnis, est aussi de cet avis, de même que Garlich von Essen de l'Esa. « Que ferons-nous si les NBT ne sont pas autorisées en Europe, s'interroge-t-il. La R & D va là où elle a des marchés. Et si nous perdions la R & D de nos entreprises, cela aurait forcément des incidences sur l'avenir de notre secteur. »
(1) L'indice HHI, largement utilisé par l'autorité de la concurrence américaine et de l'UE, est égal à la somme des carrés des parts de marché des firmes. Sa valeur maximale est de 10 000, soit le cas d'une firme qui à 100 % du marché, donc100 x 100.
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